mercredi 18 février 2009

MONSIEUR LE PRÉSIDENT, IL FAUDRA BIEN EN ARRIVER À LA RÉVOLUTION COMPTABLE

Hier, Jeudi 5 Février à environ 21 h 00, quand vous avez parlé de la répartition des profits dans l'entreprise, j'ai bien cru que vous alliez en arriver à l'essentiel…, mais vous avez passé à côté !

Vous n'avez pas évoqué la réforme la plus nécessaire à une gestion économique efficace : celle des modalités de gestion de nos entreprises. Je voudrais me permettre une petite réflexion à ce sujet.

D'où vient une entreprise ?

Elle naît de la rencontre entre un projet de production ou de service et l'apport financier ad hoc auquel se risque des "actionnaires".

Cet apport est le capital social ; il est rémunéré chaque année par le succès du projet, sous forme de "dividendes", qui sont la répartition du bénéfice restant après impôt et provisions financières raisonnées.

En résumant, ce bénéfice ressort de la différence entre "l'Actif" (qui est censé être la richesse acquise de l'entreprise) et le "Passif", dans lequel sont décomptés les coûts des produits vendus. Malheureusement, le plan comptable additionne dans une même colonne les matières premières, le fioul, les produits d'entretien, etc… et les personnes qui concourent au résultat de l'entreprise. Autrement dit, cette richesse de connaissances, d'efforts, de dévouements et de simple honnêteté qu'on appelle aujourd'hui du nom pompeux de "Ressources Humaines" n'apparaît dans le bilan que comme une des charges qu'une bonne gestion se doit de réduire le plus possible. Et cette charge n'a pas plus de droit à influer sur les destinées de l'entreprise que les matières premières, le fioul, etc…

Mais…

Comment s'enrichit l'entreprise ?

De 3 façons :

  1. Par augmentation du capital social, apport des ou de nouveaux actionnaires,
  2. Par l'amortissement des investissement que ses résultats lui permettent,
  3. Par endettement auprès d'un (ou des) actionnaires : un prêt lui permet d'investir au-delà de ses résultats et elle le rembourse sur les résultats futurs.

Si bien que, à un moment donné, la richesse de l'entreprise se décompose en deux parts :

  • L'apport financier : capital social d'origine + augmentations éventuels (point 1 ci-dessus).
  • Les résultats de l'activité de l'entreprise, donc du travail de ses dirigeants et de son personnel (cf 2 et 3).

Néanmoins, ce sont les actionnaires (gestionnaires du capital social) qui désignent seuls les Administrateurs et leur confient l'avenir de l'entreprise et de ses salariés.

Or, je sais, par expérience d'ex chef d'entreprise, que la proportion de ce capital reste souvent faible ; ceci pour diverses raisons stratégiques qu'il serait trop long d'analyser ici (en particulier un actionnaire majoritaire gagne plus en prêtant à l'entreprise, moyennant un taux d'intérêt confortable qu'à "risquer ses billes" dans le capital).

Le pouvoir décisionnel appartient donc à des gens qui n'ont participé que (souvent très) minoritairement aux résultats de l'entreprise..

Bien évidemment il peut exister de graves conflits entre l'évolution de celle-ci et les intérêts des actionnaires.

Pourquoi toutes les tentatives de "Participation" échouent-elles depuis sept décennies ?

Il existe dans toute entreprise, une part d'enrichissement, d'ailleurs fort variable, qu'on peut mesurer par la différence entre l'actif et le capital social : elle constitue l'enrichissement réel de l'entreprise. La seule "participation" qui ait une chance de dynamiser nos entreprises et créer un climat social constructif consiste à donner à cette part productive de l'entreprise les deux pouvoirs d'information et de décision qui lui reviennent.

Il faut donc refonder le conseil d'administration en donnant un pouvoir électif (dont les clefs sont à inventer) à des représentants qualifiés émanant de l'encadrement et des exécutants, dont le nombre dépendrait de la proportion constatée entre enrichissement réel et capital investi, lesquels représentants ne devraient probablement pas être d'origine syndical, parce que la gestion n'est pas l'affaire des syndicats.

Voilà une "réforme" vraiment utile à entreprendre.

Mais on n'en arrivera pas là sans réformer d'abord le plan comptable

C'est devenu indispensable maintenant que nous bénéficions d'une gestion informatisée : étant donné qu'aucune ligne de bilan ne "saisit" la valeur des personnes autrement que comme "Main d'œuvre" et "Charges sociales", un ordinateur trouve dans ces deux lignes la source d'économies (et plus encore de valorisation boursière) mathématiquement la plus juteuse. L'ordinateur le mieux programmé ne peut que manipuler les données comptables dont on le nourrit : un disque de "1000 Gos" est capable de répéter "oui ou non ?", "oui ou non ?", "oui ou non ?"… mille milliards de fois : cette belle performance permet des prouesses de calcul, mais mille milliards de "oui-non" ne feront jamais un début de raisonnement sensé !.

Tant qu'un patron était une (ou des) personne (s), fut-il âpre au gain et le pire des "ploutocrates, il savait qu'on n'achète pas "en ligne" les qualités des personnes qui constituent la spécificité d'une entreprise. Il savait aussi que les machines, standardisées et rapidement périmées, constituent de moins en moins réellement des "richesses", parce que tout le monde peut s'offrir les mêmes, à l'identique. Mais un outil informatique de gestion ne sait rien de cela… alors il conduit les affaires "comme un aveugle guidé par des aveugles".

Il suffit de suivre au jour le jour le cours d'une action "CAC 40" pour constater cette défaillance du discernement : on mesure à quel point nulle réflexion intelligente n'en dicte les variations !

Dans le contexte actuel de gestion, il est donc urgent, pour notre avenir économique et social, de trouver un moyen pour que les personnes de l'entreprise cessent de figurer dans la même colonne que les coûts matériels d'exploitation.

Merci de votre attention, Monsieur le Président.

René Deveaux,

Ex directeur d'entreprise et administrateur de société

vendredi 8 février 2008

dioxyde de carbone et carburants

A terme, les produits pétroliers vont se raréfier irrémédiablement.
Dans cette perspective là, les bo-carburants sont le type même de la fausse solution : les façons cuturales, la colleste et la distillation consomment plus de pétrole qu'elles n'en remplacent !
quant à l'émission de CO2 la filiére "bio" est théoriquement défendable dans la mesure où les végétaux sont censés consommer le CO2 produit par leur combustion...; réserve faite pour le pétrole que consomme leur production ! (cf. ci-dessus).
En investissant massivement dans cette voie, les pouvoirs publics :
1/ nous leurrent pour nous endormir,
2/ fournissent à quelques betteraviers-céréalers et à des financiers un moyen inespéré de s'enrichir ,
3/ mettent en danger la production alimentaire.

Il est malhonnête de ne pas prendre dès maintenant la première mesure qui s'impose ; c'est à dire mettre en place progressivement la suppresson massive de consommation des produits pétroliers. Par exemple cesser de consommer des tonnes de kérosène pour importer de très loin des produits aussi inutiles que le raisin ou les abricots, etc.. du Chili ou d'ailleurs. Dans la foulée, on peut trouver des floppées de consommations pétrolières tout aussi inutiles..., dont le public ordinaire, de plus en plus appauvri, se passerait aisément. Il est vrai que tant de profits financiers s'édifient sur cette parfaite inutilité !

Il est tout aussi malhonnête de bercer les consommateurs avec les "piles à hydrogène" sans souligner l'énorme consommation d'énergie nécessaire pour produire H2..., et donc sans souligner que cette hypothèse nécessite parallèlement une énorme augmentation du parc de cenrales nucléaires, seules capables de fournir d'aussi considérables quantités d'énergie.

Parmi les mesures simples qui pourraient être prises sans attendre, je pense que figure le courage de modifier considérablement les conditions de circulation urbaine en prévoyant un moratoire de 5 ou 7 ans après lequel la circulation de véhicules autres qu'électriques (ou utilisant toute autre accumulation d'énergie "propre") serait interdite dans les agglomérations (ville + banlieue) de plus de un million d'habitants.
Ce qui, là aussi, suppose de prévoir plus qu'un doublement des moyens de production d'énergie "propre".

L'avenir n'est pas du tout bouché. Simplement, il faut cesser d'émettre des rideaux de fumée fallacieux, informer loyalement les citoyens et, surtout, obtenir qu'ils s'impliquent non pas à coup de réglementations ou d'ukases mais par des négociations intelligentes.
Il est vrai que, dans ce domaine là, notre vieux pays monarchique a encore tout à apprendre !

jeudi 24 janvier 2008

la bande de Gaza

Bande de Gaza

Les événements actuels nous font prendre conscience que la planète a bien un nombril. Il ne se situe pas à Delphes, contrairement à ce que pensaient les Grecs, mais dans cette zone où tout s'est toujours joué et qu'on appelle aujourd'hui, avec la brutalité utilitaire qui caractérise notre langage contemporain : "la Bande de Gaza".

Un nombril, par lequel passe la lente et douloureuse gestation d'un monde encore loin de son achèvement, qui est l'exact point de jonction entre l'Asie, l'Afrique et l'Europe ; c'est-à-dire entre les deux courants d'humanité qui ont convergé vers l'Europe : la lente montée des descendants de Lucie le long du Nil et la formidable puissance d'expansion extrême orientale.

Sans oublier le mythe "originel" : si Adam a été "chassé" (?) de l'Eden, il n'a pu passer que par là avant d'atteindre le vaste monde….

Ni l'Exode biblique : c'est probablement par là que la foule des transfuges venus d'Égypte est entrée en "terre de Canaan" et a commencé sa brutale colonisation de la Palestine…., malgré la consigne donnée par l'Éternel à l'ancêtre Abraham ("tu dois savoir que tes enfants seront toujours des étrangers immigrés sur une terre étrangère").

Et si on en croit l'Évangile, c'est probablement par là que Joseph a passé pour soustraire Jésus à la jalousie meurtrière d'Hérode et que le même Jésus est revenu… pour inviter les occupants de cette contrée à respecter "l'étranger" et considérer "l'autre" non pas comme un gêneur à éliminer mais comme un prochain à servir.

Autant dire que les événements de ce coin de planète nous intéressent plus directement que nous ne l'imaginons.

vendredi 7 décembre 2007


"SPE SALVI" UNE NOUVELLE ENCYCLIQUE DE BENOÎT XVI

Au moment où la communication moderne étale sous nos yeux tous les malheurs du monde et toutes les raisons de désespérer qu'il contient, le Pape nous rappelle fort opportunément les racines de l'espérance chrétienne, dans un document dont

voici quelques extraits.

Espérance et foi :

"Espérance" est le mot central de la foi biblique…", nous dit-il d'emblée, parce que l'Évangile n'est pas seulement une annonce ; il est "une communication qui produit des faits et change la vie". Grâce à quoi, bien que vivant dans une société imparfaite, les chrétiens "appartiennent à une société nouvelle vers laquelle ils sont en chemin".

La Bonne Nouvelle qu'ils ont reçue leur garantit en effet que "ce ne sont pas les lois de la matière… qui sont l'instance ultime, mais… une Personne. Et si nous connaissons cette Personne et si elle nous connaît… ; alors nous sommes libres". Le Christ "connaît… la voie qui passe par le ravin de la mort"… Il l'a vaincue et Il est "revenu pour… nous donner la certitude que, avec Lui, on trouve un passage…."

En incitant "la raison à consentir à ce qu'elle ne voit pas", la foi "attire l'avenir dans le présent…et le fait que cet avenir existe change le présent…".

La vie éternelle :

Benoît XVI se demande d'abord : "voulons-nous cela : vivre éternellement ?"…et il répond : -"d'une part, nous ne voulons pas mourir…, d'autre part nous ne désirons même pas continuer à exister de manière illimitée"… sur "une terre qui n'a pas été créée dans cette perspective"…. Mais "que signifie véritablement "éternité" ?"... Pour lui, ce n'est pas une durée infinie, mais un "moment… dans lequel le temps n'existe plus" et vers lequel " tend l'espérance chrétienne…, le moment d'immersion dans l'océan de l'amour infini.

À partir de cette réflexion il nous met en garde contre la tentation, trop actuelle, du salut individuel ; alors que, pour les Pères de l'Église "le salut a toujours été considéré comme une réalité communautaire". Selon lui, la vie que Saint Augustin dit "bienheureuse" "présuppose qu'on sorte de la prison de son propre moi". Il en trouve une bonne illustration dans la vie monastique des premiers siècles qui a offert à tant d'hommes jeunes de "faire leur salut" dans "une tâche pour toute l'Église et par conséquent pour le monde" ; tandis que les impasses de l'histoire actuelle nous incitent à comprendre "qu'aucune structuration positive du monde ne peut réussir là où les âmes restent à l'état sauvage".

Foi, espérance et temps modernes :

Le Saint Père se demande : "Comment en est-on arrivé à interpréter le salut de l'âme comme une fuite devant la responsabilité pour l'ensemble ?".

Il en trouve une des causes dans la "vision programmatique" qui résulte de l'application à la théologie de la "corrélation entre science et pratique…". Cette vision obture la perspective que le Christ a donnée au monde par la Rédemption.

Dans une synthèse historique, qui part des "Lumières" et aboutit à l'expérience marxiste, il montre clairement que toute expérience matérialiste dite "raisonnable" met l'homme en péril, en oubliant que "la liberté demeure toujours liberté, même pour le mal" et que "l'homme n'est pas seulement le produit de conditions économiques".

À partir de ce constat, il invite les chrétiens à définir leur espérance de telle sorte que, "à une autocritique de l'ère moderne soit associée une autocritique du christianisme moderne". Le progrès technique qui va "de la fronde à la mégabombe" appelle à "un progrès dans la formation éthique de l'homme". Le Pape ne met pas en doute que "la victoire de la raison sur l'irrationalité" soit "aussi un but de la foi chrétienne". Encore la raison doit-elle être vraiment humaine ; or, elle ne le devient qu'en s'ouvrant aux "forces salvifiques de la foi, au discernement entre le bien et le mal". Dans cette optique, "la raison a besoin de la foi", parce que "Dieu n'entre vraiment dans les choses humaines" que si nous le laissons nous rencontrer et nous parler ; c'est-à-dire "s'il n'est pas uniquement pensé par nous".

Quelle espérance chrétienne apporter ? :

La réponse de Benoît XVI passe par le nécessaire constat de ce qui différentie les deux voies de progrès : celle de la connaissance et celle de "la conscience éthique et de la décision morale". La connaissance peut additionner les acquis successifs qui lui assurent une "continuité", tandis que la conscience éthique est à réinventer pour "tout homme", car chacun de nous "est un nouveau commencement" : chacun peut aussi bien refuser qu'accepter le trésor moral légué par l'humanité entière, parce que "la conviction qui justifie l'adhésion à l'ordonnancement communautaire n'existe pas en soi" mais "doit être reconquise de manière communautaire". Il faut avoir le réalisme d'admettre que "puisque l'homme demeure toujours libre" –d'une liberté toujours fragile- le règne du bien définitivement consolidé n'existera jamais en ce monde".

Alors, ce monde, comment le vivre ?

Chacune de nos vies est "rachetée" par un ou plusieurs amours, qui lui donnent un sens, mais l'amour est fragile, relatif aux aléas. Seul "l'amour absolu", qui "existe avec une certitude absolu", peut nous racheter absolument… Un tel amour nous élève bien au-delà du salut individuel : "l'amour de Dieu se révèle dans la responsabilité envers autrui", souligne le Pape.

Diverses espérances jalonnent une vie, mais "l'homme a besoin d'une espérance qui va au-delà". Si on se contente de la seule perspective de la "raison" et du "progrès", on en reste aux schémas théoriques de structures sociales parfaites ; or, nous savons aujourd'hui que chaque application de tels schémas a été une menace pour la liberté. Il est temps de nous souvenir "qu'un monde sans liberté n'est en rien un monde bon".

Les "lieux" d'apprentissage et d'exercice de l'espérance :

Quatre "lieux" nous sont proposés :

1/ D'abord la prière, mais à condition qu'elle soit "l'espérance active…pleinement humaine", car "prier ne signifie pas sortir de l'histoire et se retirer dans l'espace privé de son propre bonheur".

2/ "l'espérance en acte" qu'est toute action pour le droit de l'homme ; pourvu qu'elle se situe dans une perspective plus large que des engagements à courte vue ou partiaux.

3/ La compassion et la recherche inlassable de remèdes aux misères, que le rétrécissement informatif de la planète nous rend chaque jour plus présentes. C'est le moyen d'affirmer que l'inaccomplissement du monde ne saurait empêcher l'espérance. "La passion de Jésus n'a de sens pour moi que si toute personne qui souffre est suffisamment importante pour que je me mobilise pour elle".

4/ L'acceptation que notre vie soit promise à un "jugement". Cette acceptation est une assurance que "Dieu existe…, qui sait créer la justice d'une manière que nous ne sommes pas capables de concevoir".

L'au-delà de la vie :

Pour aborder ce sujet, Benoît XVI nous rappelle une dimension chrétienne essentielle : la Communion des Saints, laquelle nous invite à "nous rendre compte qu'aucun homme n'est une monade fermée sur elle-même. Nos existences sont… reliées l'une à l'autre… Nul ne pèche seul, nul n'est sauvé seul".

Le Pape conclut par la belle image de Marie "étoile de la mer", la première des " vraies étoiles de notre vie : les personnes qui ont su vivre dans la droiture".

Une phrase, qu'on trouve dès le début de ce document suffirait à résumer cette analyse, trop succincte, de la pensée de Benoît XVI : elle définit "l'élément caractéristique des chrétiens : le fait qu'ils ont un avenir : ce n'est pas qu'ils sachent dans le détail ce qui les attend, mais ils savent d'une manière générale que leur vie ne finit pas dans le néant".

René Deveaux

jeudi 22 novembre 2007

BANGLADESH

La catastrophe humanitaire qui se déroule là-bas n'occupe que le deuxième plan de l'actualité médias. Et c'est bien dommage parce que, au-delà du deuil en humanité qu'elle devrait nous faire porter, elle pourrait être pour nous pleine d'avertissements essentiels.
Rassurez-vous, je ne vais pas profiter de cette occasion pour ressasser, une fois encore, les histoires de réchauffement climatique, de montée des océans et de tous les "marronniers" dont se régalent nos fabricants d'info. Le climat s'est déjà réchauffé et refroidi un nombre inconnaissable de fois depuis que le premier brontosaure a poussé son premier vagissement !

Non. Ce qui est pitoyable dans cette affaire, c'est que nous faisons semblant d'en être surpris !
Nous sommes dans un cycle géologique pendant lequel l'eau va monter inexorablement, avec une conséquence, parmi d'autres : la plus grande partie du territoire Bangladeshi est voué à une prompte disparition, à la fois géographique et alimentaire parce que le salage de la mangrove détruit sa flore utile et sa faune. Cela, tout le monde le sait.
L'écologie a bien raison de vouloir éloigner les échéances, mais ce cataclysme est inévitable ; et qu'est-ce qu'on fait pour le conjurer ?... À part pousser des chansonnettes dans des "galas de charité" pour saisir l'opportunité de dorer quelques images de marque grâce au prime time et ramasser quelques sous dont 20 %, au mieux, arriveront- et encore, trop tard- à la population victime de l'inondation de plus en plus périodique.
Qui se soucie, à l'ONU ou ailleurs, de la seule réponse valable à ce problème : prévoir ce qui deviendra inévitable avant une génération ? C'est-à-dire organiser dès maintenant, avec les populations intéressées (non pas avec les "dirigeants" qui excellent, eux, à "diriger" les crédits vers leurs coffres forts) l'installation de ces gens (pas le moins du monde "sous-développés" !) sur une terre, qu'il faudrait déjà être en train de choisir et préparer, si on ne veut pas voir chaque crue dépasser les records en millions de morts.
Et qu'on ne m'accuse pas d'utopie en me disant, d'un air docte (ou insouciant) :
-"La terre est déjà trop petite ; alors qu'est-ce que tu veux qu'on y fasse ?"... Les gens dits "sérieux" qui serinent pareil argument oublient que c'est leur tête à eux qui est trop petite pour penser hors de leurs routines.
C'est vrai qu'il existe des situations insolubles…; mais tout problème est insoluble si on en oublie –surtout volontairement- les données ! Quoi qu'on en dise, il est très peu de catastrophes vraiment imprévues : tout événement devient catastrophe si on refuse de le voir venir et de se préparer à en pallier intelligemment les conséquences ; non pas par des solutions toutes faites concoctées avec des "experts", mais en conjuguant, très humblement, les vraies bonnes volontés pour découvrir les voies inédites qui ouvriront l'avenir.

Revenons en au petit bout de notre lorgnette : on pourrait en dire autant, par exemple, du "recul de l'âge de la retraite".
Ni l'évolution démographique ni le changement drastique des conditions de travail ne nous sont tombés dessus un beau matin, à l'occasion d'une "présidentielle" : c'est une situation qu'on voit venir, mathématiquement parlant, depuis 20 ans, mais à laquelle on a refusé de se préparer parce qu'elle aurait interféré de façon gênante avec les courtes échéances des scrutins successifs (qu'ils soient politiques ou syndicaux) ; alors elle est devenue indigeste et on essaie –de part et d'autre- de s'en sortir par des effets d'annonce mal orchestrés et des techniques de communication et de concertation complètement obsolètes…, après avoir fait la preuve qu'on n'avait aucune notion saine des ordres d'urgence.

Ces deux réflexions convergent vers notre "mal du siècle" (pas romantique celui-ci !), qui est le court terme : il faut, dans son petit coin, gagner le maximum de voix et de puissance pour les uns, ou, pour les autres de fric (mais ce n'est là que l'autre nom de la volonté de puissance) dans le minimum de temps…
Cela est vrai à toutes les échelles, du haut en bas de la "hiérarchie". Évidemment, pareille optique ne permet pas d'explorer intelligemment le seul plan sur lequel se joue l'avenir de l'homme-et-femme : le long terme... "Après moi, le déluge", dit notre avant dernier roi absolu…, avant que son petit fils se fasse couper la tête.
(à propos, la Genèse nous apprend qu'on s'est trouvé aussi "pris de court" face au vrai Déluge : une société à deux vitesses dans laquelle "l'élite" (?) des "fils des dieux" imposait aux "fils des hommes" de satisfaire leurs petites jouissances sans lendemain).

On sait de plus en plus de choses aujourd'hui, mais on se dispense d'apprendre l'essentiel : utiliser à bon escient notre bien le plus précieux, les heures qui passent. Je n'ai jamais vu gaspiller le temps aussi gaillardement qu'à notre époque où toutes nos technologies prétendent l'économiser !
Nous savons comptabiliser nos sous, mais nous dissipons le plus généralement ce qu'aucun logiciel ne nous permet de thésauriser : notre temps…, qui ne prend de la valeur que si nous avons le souci d'en faire quelque chose d'utile.
Malheureusement, cette valeur irremplaçable, on ne la mesure que quand le temps nous devient compté !
Tout ce que je viens de vous dire ne serait-il donc rien de plus qu'un raisonnement de vieillard ?
En tous cas, je l'assume et je pense que ceux qui croient encore avoir du temps à profusion devant eux devraient quand même tenir compte de ce constat, aussi bien au quotidien que dans les grandes options où ils peuvent influencer l'avenir… qui leur appartient.

René Deveaux

lundi 5 novembre 2007

À PROPOS D'UNE "COMMÉMORATION"

Je suis très exactement un contemporain de Guy Mocquet : quand après la Libération, nous avons connu son nom et son émouvant adieu aux siens, il a rejoint pour moi la mémoire des deux copains et du prof de philo arrêtés en plein cours, devant nos yeux, à quelques jours d'intervalle…, et qui ne sont jamais revenus.


Donc, s'il fait partie des héros qu'on honore, il incarne d'abord, pour moi, le souvenir de toutes les jeunes vies gaspillées par une double absurdité :

  • La cruauté absurde d'une armée d'occupation et de sa sinistre comptabilité en victimes et en otages,

  • L'absurdité de certaines options dans la "gouvernance" publique de "l'entre-deux-guerres", dont le manque de lucidité et même, peut-être quelquefois, la cécité volontaire avaient offert à cet instrument de violence une victoire inespérée.

Ubu, roi de l'absurde, fait d'abord rire le spectateur…; mais on finit par pleurer en lisant la lettre d'un jeune fusillé.


Il ne suffit pas d'honorer cette mort héroïque ; encore faut-il se demander pourquoi –et comment- on en est arrivé à un moment de notre Histoire où la défense de la liberté passait par des morts héroïques. En entendant lire si officiellement cette lettre, j'ai regretté qu'on n'en ait pas fait l'occasion de se poser une telle question.

Non pas pour fouiller dans les fautes passées mais pour exercer les destinataires de cette lecture –nos lycéens- à discerner, dans les perspectives du temps qui va être le leur, les périls pour la liberté, qui s'ils changent de look ne perdent rien de leur virulence, bien au contraire.

Je crains que, si elle a été écoutée, cette lecture soit seulement reçue par les jeunes auditeurs comme une leçon d'Histoire et, au mieux, comme un appel à leur courage personnel dans les tragédies qui traversent toute vie ; alors qu'elle aurait pu être source d'une réflexion collective pour assurer un avenir à la liberté.

J'ai bien dit : réflexion" ; non pas inventaire des erreurs, des fautes ou des omissions, quelle que fût leur inspiration.

En effet, on ne peut préserver efficacement la liberté que par ce que les horticulteurs appellent un "traitement systémique" ; c'est-à-dire en cherchant la racine profonde de tous les méfaits qui la menacent.


On s'apercevrait alors que l'égoïsme de classe, le laxisme hédonique et la démagogie ont une racine commune : le MÉPRIS DE L'HOMME, qu'il soit inconscient ou calculé.

Car il existe tant de recettes pour mépriser l'humanité de l'Homme !

Aussi bien en l'exploitant comme machine à produire qu'en faisant mine de tout lui donner pour le réduire à la condition de quémandeur et d'assisté. En le "distrayant" ou en le puérilisant par la dissimulation des périls (*).

Mais, surtout, en recourant à ce moyen imparable : ne pas désigner mon prochain par son nom d' "HOMME", mais par un qualificatif approprié, à choisir dans une liste interminable et sans cesse enrichie.

Ou encore en le brutalisant jusqu'à ce qu'il ait perdu figure humaine pour pouvoir dire, en se lavant dignement les mains : "Voici l'Homme"… Mais, nous, nous savons que cet otage, "mort pour tout le peuple", est ressuscité, affirmant que rien ne peut faire taire l'Homme, dans aucun homme.

Par la lucidité et le courage qu'elle exprime, cette lettre d'un jeune fusillé, devenue maintenant monument national, le prouve.

Tout simplement.

Elle devrait nous inciter à dire cette espérance à notre monde moderne ; c'est-à-dire à rappeler "à temps et à contre temps" que son dieu a donné à l'Homme une telle valeur que toute option mettant en question la dignité, sociale ou morale, du plus insignifiant d'entre nous menace l'avenir de la liberté.


René Deveaux


(**) à titre d'exemple : en 1938, "bande de c…", murmurait notre Président du Conseil, retour de Münich ; ce qui ne l'empêchait pas de se laisser acclamer par une foule soigneusement contre informée…).