jeudi 22 novembre 2007

BANGLADESH

La catastrophe humanitaire qui se déroule là-bas n'occupe que le deuxième plan de l'actualité médias. Et c'est bien dommage parce que, au-delà du deuil en humanité qu'elle devrait nous faire porter, elle pourrait être pour nous pleine d'avertissements essentiels.
Rassurez-vous, je ne vais pas profiter de cette occasion pour ressasser, une fois encore, les histoires de réchauffement climatique, de montée des océans et de tous les "marronniers" dont se régalent nos fabricants d'info. Le climat s'est déjà réchauffé et refroidi un nombre inconnaissable de fois depuis que le premier brontosaure a poussé son premier vagissement !

Non. Ce qui est pitoyable dans cette affaire, c'est que nous faisons semblant d'en être surpris !
Nous sommes dans un cycle géologique pendant lequel l'eau va monter inexorablement, avec une conséquence, parmi d'autres : la plus grande partie du territoire Bangladeshi est voué à une prompte disparition, à la fois géographique et alimentaire parce que le salage de la mangrove détruit sa flore utile et sa faune. Cela, tout le monde le sait.
L'écologie a bien raison de vouloir éloigner les échéances, mais ce cataclysme est inévitable ; et qu'est-ce qu'on fait pour le conjurer ?... À part pousser des chansonnettes dans des "galas de charité" pour saisir l'opportunité de dorer quelques images de marque grâce au prime time et ramasser quelques sous dont 20 %, au mieux, arriveront- et encore, trop tard- à la population victime de l'inondation de plus en plus périodique.
Qui se soucie, à l'ONU ou ailleurs, de la seule réponse valable à ce problème : prévoir ce qui deviendra inévitable avant une génération ? C'est-à-dire organiser dès maintenant, avec les populations intéressées (non pas avec les "dirigeants" qui excellent, eux, à "diriger" les crédits vers leurs coffres forts) l'installation de ces gens (pas le moins du monde "sous-développés" !) sur une terre, qu'il faudrait déjà être en train de choisir et préparer, si on ne veut pas voir chaque crue dépasser les records en millions de morts.
Et qu'on ne m'accuse pas d'utopie en me disant, d'un air docte (ou insouciant) :
-"La terre est déjà trop petite ; alors qu'est-ce que tu veux qu'on y fasse ?"... Les gens dits "sérieux" qui serinent pareil argument oublient que c'est leur tête à eux qui est trop petite pour penser hors de leurs routines.
C'est vrai qu'il existe des situations insolubles…; mais tout problème est insoluble si on en oublie –surtout volontairement- les données ! Quoi qu'on en dise, il est très peu de catastrophes vraiment imprévues : tout événement devient catastrophe si on refuse de le voir venir et de se préparer à en pallier intelligemment les conséquences ; non pas par des solutions toutes faites concoctées avec des "experts", mais en conjuguant, très humblement, les vraies bonnes volontés pour découvrir les voies inédites qui ouvriront l'avenir.

Revenons en au petit bout de notre lorgnette : on pourrait en dire autant, par exemple, du "recul de l'âge de la retraite".
Ni l'évolution démographique ni le changement drastique des conditions de travail ne nous sont tombés dessus un beau matin, à l'occasion d'une "présidentielle" : c'est une situation qu'on voit venir, mathématiquement parlant, depuis 20 ans, mais à laquelle on a refusé de se préparer parce qu'elle aurait interféré de façon gênante avec les courtes échéances des scrutins successifs (qu'ils soient politiques ou syndicaux) ; alors elle est devenue indigeste et on essaie –de part et d'autre- de s'en sortir par des effets d'annonce mal orchestrés et des techniques de communication et de concertation complètement obsolètes…, après avoir fait la preuve qu'on n'avait aucune notion saine des ordres d'urgence.

Ces deux réflexions convergent vers notre "mal du siècle" (pas romantique celui-ci !), qui est le court terme : il faut, dans son petit coin, gagner le maximum de voix et de puissance pour les uns, ou, pour les autres de fric (mais ce n'est là que l'autre nom de la volonté de puissance) dans le minimum de temps…
Cela est vrai à toutes les échelles, du haut en bas de la "hiérarchie". Évidemment, pareille optique ne permet pas d'explorer intelligemment le seul plan sur lequel se joue l'avenir de l'homme-et-femme : le long terme... "Après moi, le déluge", dit notre avant dernier roi absolu…, avant que son petit fils se fasse couper la tête.
(à propos, la Genèse nous apprend qu'on s'est trouvé aussi "pris de court" face au vrai Déluge : une société à deux vitesses dans laquelle "l'élite" (?) des "fils des dieux" imposait aux "fils des hommes" de satisfaire leurs petites jouissances sans lendemain).

On sait de plus en plus de choses aujourd'hui, mais on se dispense d'apprendre l'essentiel : utiliser à bon escient notre bien le plus précieux, les heures qui passent. Je n'ai jamais vu gaspiller le temps aussi gaillardement qu'à notre époque où toutes nos technologies prétendent l'économiser !
Nous savons comptabiliser nos sous, mais nous dissipons le plus généralement ce qu'aucun logiciel ne nous permet de thésauriser : notre temps…, qui ne prend de la valeur que si nous avons le souci d'en faire quelque chose d'utile.
Malheureusement, cette valeur irremplaçable, on ne la mesure que quand le temps nous devient compté !
Tout ce que je viens de vous dire ne serait-il donc rien de plus qu'un raisonnement de vieillard ?
En tous cas, je l'assume et je pense que ceux qui croient encore avoir du temps à profusion devant eux devraient quand même tenir compte de ce constat, aussi bien au quotidien que dans les grandes options où ils peuvent influencer l'avenir… qui leur appartient.

René Deveaux

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